Homme, qui profane mes sillons et déchire mon ventre en amère curée. Dans l’impuissance des lendemains, ma vie expire doucement oblitérée dans ton absurde folie.
Regarde, l’Homme, regarde alentour. Je ne suis plus qu’un butin qui remplit tes cales, un réservoir aux charrois de saletés que les pores de ton humanité excrètent vers mes reins saturés. La rosée de mon sépulcre transpire la fièvre pourpre de la lie que tu inocules en mes veines.
Oui, toi, l’Homme ! Avant le jour du soleil noir, décloue tes paupières d’asphalte -fausse pudeur d’indifférence - gris-veule qui voile de glu ta conscience
Ne vois-tu pas ? Ton assentiment muet est patine de noirceur aux strates de ma carapace tandis que se greffent en mes entrailles tes moisissures de civilisation.
Ne vois-tu pas les lignées que tu enfantes - mort-nés d’une terre qui fut belle – à l’ombre de nuages qui pleurent leur ciel de suie, en-deça de balayures crasseuses soufflées toujours un peu plus loin au seuil de l’autre…?
Homme, se peut-il que tu m’aimes, terre nourricière qui te donnai le jour à l’esquisse du monde ? Se peut-il que tu aimes tes fils que tu condamnes à l’écume fuligineuse de l’éternité ? Se peut-il que tu épargnes – miséricorde ? – le souffle de tous les frères que tu enterres dans la fange des cratères de la modernité.